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La Vallée de l'Annapolis, le Niagara de la Nouvelle-Écosse

Photo du rédacteur: Mario GriffinMario Griffin

Au début du mois d’octobre, j’ai effectué un petit séjour dans la bulle Atlantique. En fait, en présence d’un couple d’amis nous étions pour quelques jours dans la région urbaine d’Halifax. Force est d’admettre que nous avons su profiter à temps de nos libertés avec la menace d’une deuxième vague de la COVID.

Pendant ces 4 jours, nous avons, bien entendu, passé par l’incontournable région de Lunenburg, Mahone Bay, sans oublier la visite de Peggy’s Cove et de son phare symbolique, soit le phare le plus photographié au pays.


Nous avons aussi profité du dimanche 4 octobre pour nous rendre dans la région viticole néo-écossaise pour y visiter quelques vignobles. À partir d’Halifax, via la route 101, ce trajet d’un peu plus d’une heure nous permet de traverser la province du sud au nord pour quitter le littoral de l’Atlantique vers le Bassin des Mines.



Notre itinéraire nous mena dans la région de la Vallée d’Annapolis, plus précisément à Wolfville où l’on retrouve la plus grande concentration de vignobles de la province, soit une vingtaine. En comparaison, l’Ontario est depuis plusieurs décennies, identifiable pour ses vins grâce à la région de la Péninsule du Niagara dont les chutes ne sont plus l’unique attrait. L’œnotourisme est prospère et c’est un peu ce qui est en train de se produire dans ce coin de la Nouvelle-Écosse, niché aux abords de la Baie de Fundy. Le site de Grand-Pré est reconnu comme haut lieu de mémoire et de rassemblements. C’est le seul site au Canada inscrit comme paysage culturel à l’UNESCO, véritable reconnaissance pour toute la communauté acadienne. Fait à souligner lors de notre passage dans la région de Wolfville, nous avons été témoin en plein début d’octobre d’un embouteillage dans cette petite localité de plus de 4195 âmes. L’endroit est aussi prisé par les amateurs de pommes à l’automne.


Ceci ne nous a toutefois pas découragés et nous avons profité de ce dimanche ensoleillé pour visiter Blomidon Estate Winery, Benjamin Bridge et Lightfoot & Wolfville.


Blomidon Estate Winery


Je n’en étais pas à ma première expérience dans les vignobles en Nouvelle-Écosse, mais à ma première visite chez Blomidon EstateWinery. Notre premier arrêt de dégustation. L’établissement est niché sur la rive du bassin Minas, près de Canning, et représente une halte pittoresque pour les visiteurs qui peuvent admirer, sur la route vers le vignoble, l’impressionnant rocher rouge du Cap Blomidon. Samuel de Champlain l’avait baptisé « Cap Poutrincourt » mais le nom ne perdura pas et les Acadiens le nommèrent plutôt « Cap Baptiste ». Après la Déportation, les premiers colons anglais lui attribuent le nom « Cape Porcupine », nom qu'il porta longtemps en parallèle avec celui de « Cape Blowmedown », devenu en 1959 Cap Blomidon.




Le vignoble de Blomidon date de 1986 et il était destiné à fournir des raisins à un autre pionnier de l’industrie du vin de la Nouvelle-Écosse, soit Jost Vineyards à Malagash, à plus de 200 km plus à l’est. En 2002, la propriété est devenue ce qu’elle est aujourd’hui, sous le nom de Blomidon Estate Winery.


Avec les nouvelles mesures de distanciation sociale, la dégustation est un peu différente. Les gens qui avaient l’habitude de se faire servir debout au bar à dégustation vont noter des changements qui sont appliqués dans la plupart des établissements. En fait, les gens doivent porter un masque jusqu’à leur table et ensuite, le personnel se charge d’apporter les vins désirés à la table.

Blomidon possède un portfolio d’une dizaine de vins. Il est possible notamment de déguster un volet classique ou des vins sous le volet réserve.


Nous avons eu la chance de goûter au moins 6 des 10 produits. Les blancs et les mousseux étaient particulièrement bien réussis. Le Blow Me Down White, le Riesling et le Chardonnay faisaient une bonne impression pour les vins tranquilles. Ce sont les vins effervescents toutefois qui m’ont impressionné davantage. J’ai particulièrement apprécié le Blanc de Noirs 2014, le Crémant NV et le Brut Cuvée l’Acadie NV.


Ce qui se démarque le plus chez Blomidon comme dans d’autres vignobles de cette région de la province, c’est la qualité des vins effervescents. Quant aux prix des produits, ils se situent également dans la tranche de ce qui est offert par la concurrence. À 28 dollars, le Crémant représente un excellent rapport qualité/prix et les cuvées millésimées Blanc de Noirs et Blanc de Blancs sont aussi dans le coup avec respectivement 45 et 75 dollars la bouteille.

Le vignoble est un endroit qui est un peu plus à l’écart de Wolfville, et il est encore agréable de profiter du calme des lieux pour siroter son vin sans que les gros autobus n’y débarquent en grande pompe avec les touristes.


Benjamin Bridge


Pour notre deuxième arrêt de la journée, nous nous retrouvons en territoire connu en ce qui me concerne lors de notre passage chez Benjamin Bridge. Avec mon implication au FestiVin de Caraquet, j’ai eu la chance de côtoyer plusieurs membres du personnel du vignoble dont le winemaker d’origine québécoise, Jean-Benoit Deslauriers et son assistant, Alex Morozov.Que dire de plus à propos de cette entreprise viticole qui depuis plus d’une décennie nous a épatés avec ses vins effervescents de méthode traditionnelle.


Son plus grand succès commercial, le Nova 7, démontre ses charmes avec une signature aromatique aguichante grâce à la présence d’une touche de muscat. On y retrouve aussi de l’Acadie blanc, de l’Ortega et du Geisenheim. Le mot latin Nova pour «nouveau» reflète l'idée un peu audacieuse que c’était fixé le winemaker en créant quelque chose de complètement original. Le «7» est en hommage à 2007, l’année du premier millésime commercial de ce vin qui est aujourd’hui le produit le plus vendu de BB (Benjamin Bridge) dans les magasins d’alcools de cette province (NSLC).


Profitant d’un aménagement revampé par un investissement important, il est devenu de plus en plus populaire auprès des visiteurs qui peuvent déguster un verre de vin mousseux sur la nouvelle terrasse en plein air surplombant la vallée de Gaspereau. Le domaine propose des menus de dégustation pour ceux qui souhaitent découvrir les produits de l’entreprise.

Pour ma part, je suis un inconditionnel de certains vins blancs de Benjamin Bridge comme le Véro, le Riesling et son Tidal Bay. D’ailleurs, Tidal Bay est la nouvelle appellation désignée par la Nouvelle-Écosse depuis 2010. Un comité technique indépendant veille à ce que seuls les vins présentant les caractéristiques distinctes de la région et répondant à un ensemble de normes rigoureuses soient autorisés à porter le sceau d'appellation Tidal Bay. La plupart des vignobles produisent un vin de cette appellation.



Toutefois, je dois avouer franchement avoir un faible pour les vins mousseux de Benjamin Bridge. D’ailleurs, ce qui démarque Benjamin Bridge et ses vignes au cœur de la vallée du Gaspereau sur la baie de Fundy, c’est la particularité de son climat frais qui partage des similitudes avec la région de Champagne en France. Ils travaillent en collaboration avec des consultants externes pour produire des vins mousseux selon la Méthode Classique pour élaborer des vins haut de gamme en édition limitée.


À l’aveugle, le palais le plus fin a de bonnes chances de se laisser berner en savourant un vin de Benjamin Bridge en croyant boire du vrai Champagne tellement l’on maîtrise bien l’art de faire des bulles savoureuses.

Le Brut millésimé et son Réserve sont des valeurs sûres. On y élabore également des produits d’entrée de gamme non-millésimés en version Brut et Rosé très digestes pour une trentaine de dollars.

Dans certaines compétitions à l’aveugle, des sommeliers professionnels ont déjà même préféré un vin de Benjamin Bridge en battant du même coup la fameuse Cuvée prestigieuse Crystal de Louis Roederer. De l’avis de plusieurs, la signature néo-écossaise des vins se construit de plus en plus autour des vins effervescents.


Lightfoot and Wolfville


Notre dernier arrêt et non le moindre était un peu plus structuré. En fait, en guise d’acteur dans le monde du vin, je voulais avoir un peu plus d’informations de la part des artisans de ce domaine, plus récent que les deux autres que nous avons visités. Lightfoot & Wolfville est présent sous cette étiquette depuis seulement 3 ans.



C’est pourquoi j’étais spécialement curieux d’en apprendre davantage sur ces vins d’autant plus que le domaine se taille déjà une bonne réputation malgré sa jeune histoire. La sommelière Jackie Cook nous a reçus dans une salle privée pour y déguster quelques produits dans un décor chaleureux et relaxe. Cette dernière est nouvellement arrivée dans l’équipe de ce vignoble néo-écossais alors qu’elle a œuvré dans la région viticole de l’Okanagan, notamment au sein du réputé domaine de Mission Hill, près de Kelowna. Une adaptation en elle-même puisqu’elle devait quitter l’Ouest canadien pour la côte Atlantique dans l’est du pays, et ce à un moment où la COVID prenait le statut de pandémie.


Nous avons d’abord obtenu plus de détails sur l’histoire de la famille Lightfoot qui cultive ces terres depuis huit générations dans la vallée d'Annapolis. Même si les premières bouteilles sont sur le marché depuis 2017, c’est en 2009 que les cofondateurs Michael et Jocelyn Lightfoot mettent en place leur vision de diversifier la ferme familiale en plantant des vignes pour la production de vin. Grands voyageurs et amateurs de vin, ils ont été inspirés pour implanter leur nom et y bâtir une destination agrotouristique de classe mondiale.



En voyant l’impressionnant bâtiment dès votre arrivée, il devient facile de croire qu’ils ont utilisé tous les moyens pour y parvenir. Une vaste boutique et son bar de dégustation, un restaurant avec un menu alléchant, sans oublier un magnifique hall dominé par un immense foyer. D’ailleurs, il n’y a rien de plus relaxant que de se retrouver sur le patio lorsque le soleil brille afin de déguster une bonne pizza sur feu de bois. Le chef Brady Bertrand y met sa touche pour accentuer les plaisirs de la table.


Plus de 40 acres de vignes plantés et un portfolio de plus d’une quinzaine de produits. Comme plusieurs producteurs de la Nouvelle-Écosse, les vins blancs et les mousseux sont les forces de Lightfoot & Wolfville. Les cépages nobles comme le Chardonnay, le Sauvignon Blanc, le Chenin Blanc et le Riesling sont en évidence. Nous avons d’ailleurs eu la chance de déguster le Ancienne Chardonnay et le Terroir Series Riesling. Le Chardonnay pourra se conserver facilement de 7 à 10 ans. J’ai succombé à la tentation et je vais moi-même en faire l’expérience.



Les mousseux font aussi belle figure. Nous avons comparé deux produits intéressants avec les explications de la sommelière aux lunettes originales qui ne sont pas sans rappeler un p’tit côté excentrique du pianiste et chanteur Elton John. Pour une quarantaine de dollars, le Blanc de Blancs Brut 2014 était spécialement voluptueux avec son goût riche en bouche soutenu par des bulles fines et élégantes. Nous avons également été séduit par le Brut Rosé du millésime 2018 au même prix. Un beau style de Rosé avec sa teinte saumonée, sa mousse fine et crémeuse ficelée par une acidité rafraîchissante. Élaboré avec 100% Pinot Noir, ce rosé était fort agréable avec cet alléchant plateau de charcuteries et de fromages que nous avons mangé goulûment.


Enfin, en cette période où l’achat local revêt une importance et dans une époque où notre planète semble passer des messages, l’une des grandes fiertés de Lightfoot & Wolfville est certainement rattachée à son statut de vignoble 100% bio! Ils ont eu l’ambition il y a 8 ans de faire la transition de cette ancienne terre acadienne vers la viticulture biologique et biodynamique. D’ailleurs, ils peuvent se vanter d’y être parvenus autant dans le vignoble que dans la vinification. Seulement 5 domaines au pays ont cette certification et ils sont les premiers en Nouvelle-Écosse.


Décidemment, nous nous sommes sentis privilégiés d’avoir accès à la bulle Atlantique en redécouvrant cette province voisine du Nouveau-Brunswick, mais aussi de boire de ses bulles magiques de vignobles qui nous enivrent de part leur qualité.

 
 
 

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